Maître de conférences à l’université de Toliara, le jeune ministre malagasy de la Pêche et de l’Economie bleue est reconnu comme étant un expert en économie bleue en Afrique. En effet, il fait partie des initiateurs du concept de « compatibilités océaniques » mis au point en 2021.
Il a été à ce titre invité spécialement au rendez-vous régional qui s’est tenu en Afrique du Sud. Ses interventions ont été axées sur les compatibilités océaniques de Madagascar. Il a alors souligné les potentialités de l’île et a mis en exergue les indicateurs pour une économie bleue durable, juste, équitable et responsable.
Déclin des captures
La planète Terre est à 71% couverte par les océans. D’un volume estimé à 1,37 milliard de kilomètres cubiques, ces milieux marins regorgent d’immenses ressources garantes de la survie de l’humanité. Pourtant, les nourritures issues des écosystèmes océaniques représentent seulement 3% du total consommé dans le monde.
Si l’on se réfère à la surface des océans, l’on constate une sous-exploitation comparativement à la terre ferme. En même temps, l’on assiste à une surexploitation des ressources, notamment côtières, favorisée par leur accès facile.
De ce fait, le défi actuel consiste à exploiter les ressources océaniques d’une manière durable, malgré la surpêche, la destruction des habitats et le changement climatique en général. La FAO a évalué le gap du besoin en produits halieutiques à l’horizon de 2030 à 65 millions de tonnes alors que l’on observe aujourd’hui un déclin des captures à l’échelle globale.
C’est dans ce contexte qu’un groupe de chercheurs a inventé le concept de « compatibilités océaniques ». Faisant partie intégrante de la notion d’économie bleue, celui-ci consiste à évaluer les valeurs des ressources océaniques, y compris les services océaniques ainsi que les ressources biotiques et abiotiques dont recèlent les océans.
10,6 milliards de dollars
L’estimation de leurs valeurs devrait partir de l’évaluation des stocks, de leur cartographie et du mode d’utilisation actuel. L’idée est de savoir quelles sont les ressources existantes, où elles sont et de quelle façon elles sont gérées au temps présent.
La deuxième étape, après l’état des lieux, consiste à concevoir une méthodologie de suivi régulier de ces ressources afin d’apprécier les changements (diminution, stagnation et augmentation). Les compatibilités océaniques permettent donc de mesurer les valeurs des ressources et d’apprécier les changements sur leur disponibilité.
Pour l’océan Indien occidental, dont fait partie la Grande île, le Fonds mondial pour la nature (WWF) a évalué en 2017 les actifs océaniques. La conclusion de la recherche réalisée par le bureau d’études Cordio, basé au Kenya et dirigé par Dr David Obura, suggère qu’ils seraient de 333,81 milliards de dollars. Ceux de Madagascar seraient estimés à 10,6 milliards de dollars.
Atlas maritime national
Pour la partie maritime, les compatibilités océaniques se révèlent être un outil parfait pour une économie bleue durable. Pour mettre à jour et compléter l’estimation, Madagascar aurait souhaité évaluer ses compatibilités océaniques avec l’appui des partenaires.
A noter toutefois que les activités du ministère de la Pêche et de l’Economie bleue autour, entre autres, de la planification spatiale maritime (PSM) actuelle rentrent bien dans cette optique. Elles sont prévues aboutir à un atlas maritime national.
La carte en gestation permettra de localiser les mangroves, les phanérogames (plante à fleurs et à graines) marines, les algues, les récifs coralliens, les poissons, les mollusques, les crustacés mammifères marins et reptiles marins…
Les compatibilités océaniques de Madagascar lui permettront de repérer dans le temps et l’espace ses ressources, avec leur valeur estimative, d’avoir l’idée de la façon de les exploiter d’une manière rationnelle, d’apprécier les changements tout au long de l’exploitation. Somme toute, il s’agit d’un outil efficace de gestion durable des ressources maritimes.
M.R.